République d’Haïti
Corps Législatif
Loi sur la Paternité, la Maternité et la
Filiation
Vu les articles 136,
259, 260, 261 de la Constitution haïtienne;
Vu la Convention
relative aux droits de l’enfant ratifiée par Haïti ;
Vu le pacte
international relatif aux droits civils et politiques ratifié par Haïti ;
Vu le décret du 16
janvier 1979 sanctionnant la Déclaration des Droits de l’Enfant ;
Vu les dispositions de
la loi No 8 du Code Civil Haïtien portant sur la paternité et la filiation amendées
par le décret-loi du 22 décembre 1944 et le décret du 27 janvier 1959 ;
Vu les dispositions de
la loi No 16 du Code Civil Haïtien traitant de la succession ;
Vu le décret du 14
septembre 1983 instituant et réglementant la procédure de recouvrement des créances
d’aliments et celles relatives à la garde des enfants ;
Considérant qu’en raison
des profondes mutations sociales et de la dynamique du monde il est impératif
de faire évoluer le droit de la filiation de façon positive dans le sens de
l’intérêt supérieur de l’enfant ;
Considérant que fort du
principe de l’égalité devant la loi, l’égalité en dignité et en droit il y a lieu
de mettre fin à toute différence de traitement entre enfants relevant de types
différents de filiations ;
Considérant que le
principe de l’égalité des filiations prescrit par la Constitution implique que puisse
s’établir la filiation adultérine à l’égard du parent marié ;
Considérant que la
filiation comporte des effets destinés à assurer la perpétuation biologique, sociale
et la reproduction de la famille, le transfert des biens et des valeurs
immatérielles ;
Considérant que les
principes juridiques tels la possession d’état, la reconnaissance volontaire ne
suffisent pas à régler les problèmes de filiation ; que les progrès de la
science dans le domaine médical et biologique, la maitrise des analyses du
groupe sanguin permettent d’établir le lien juridique entre un enfant et ses
géniteurs ;
Considérant que dans le
but d’éliminer toutes formes de discriminations à l’égard des femmes et des
enfants, il importe de libérer les règles d’établissement de tout type de
filiation, de permettre la recherche de la paternité ou de la maternité et de
définir une procédure capable de garantir la sécurité juridique de tous les
enfants ;
Considérant qu’il est
nécessaire de développer des normes qui répondent à une protection effective de
tous les enfants sans discrimination ;
Considérant qu’il
importe d’harmoniser les articles du Code Civil avec les conventions de droits de
la personne ratifiées par Haïti.
Le Parlement a voté la
loi suivante:
Article 1 :
L’article 1 du décret du
27 janvier 1959 consacrant l’égalité des enfants naturels et des enfants
légitimes est ainsi modifié :
Il est établi le
principe de l’égalité des filiations légitime, naturelle, adoptive ou autres, impliquant
nécessairement l’égalité entre tous les enfants qu’ils soient de couples mariés
ou non.
La filiation engendre
des droits et des obligations moraux et pécuniaires à la charge des parents et
de leurs enfants.
Article 2 :
La filiation s’établit
par l’inscription de la naissance sur les registres de l’officier de l’état civil
ou sur ceux du Consul haïtien à l’étranger, sur comparution des parents ou de
l’un d’eux muni d’un acte authentique ou d’une procuration spéciale donnée par
l’autre parent, ou d’une décision de justice passée en force de chose
souverainement jugée résultant d’une action en recherche de paternité ou de
maternité.
Dans le cas d’une
décision de confirmation de paternité ou de maternité, le nom de famille du
parent, qu’il soit marié ou non, et à quelque corps qu’il appartienne, sera
entre autre dévolu à l’enfant.
Article 3 :
L’article 293 du Code
Civil sur la paternité et la filiation est ainsi modifié :
Article 293.-
L’enfant conçu pendant
le mariage a pour père le mari. Néanmoins, celui-ci pourra intenter une action
en désaveu de paternité à n’importe quel moment au cas où il aurait des suspicions
légitimes de croire qu’il ne s’établisse entre lui et cet enfant aucun lien
biologique.
Auquel cas, le désaveu
de paternité ne peut se confirmer que par un test d’ADN (Acide
Dexoxyribo Nucléique) et
consacré par un jugement rendu en matière urgente et passé en force de chose
souverainement jugée.
Article 4 :
Sont et demeurent
abrogés les articles 294 et 295 du Code Civil.
Article 5 :
Au cas où le parent,
marié ou non, nierait tout lien biologique avec l’enfant qui se réclame de sa
filiation et refuserait de le reconnaitre, il sera, en attendant le résultat du
test, présumé en être le géniteur à compter de l’action en recherche de
paternité ou de maternité introduite par le tuteur de l’enfant.
Toute action ou affaire
en recherche de paternité ou de maternité sera assujettie à une ordonnance
permissive du Doyen. Elle sera inscrite dans un registre ou rôle non public et entendue
à huis clos dans la sérénité la plus complète, ce, pour sauvegarder l’intérêt
supérieur de l’enfant et préserver l’image de la famille. Ce jugement sera
toujours signifié par huissier commis et ne sera susceptible d’aucune publicité
dans les journaux puisque réputé contradictoire.
Article 6 :
La femme ou l’homme qui
indiquerait à tort quelqu’un étant le père ou la mère biologique présumée de
son enfant, sera puni conformément aux articles 318 et 319 du Code
Pénal relatifs à la
dénonciation calomnieuse sans préjudices de tous dommages et intérêts.
Article 7 :
L’action en recherche de
paternité ou de maternité sera introduite par le tuteur ou la tutrice de
l’enfant par devant le Juge des référés. En cette matière, le principe du
contradictoire est réputé règle primordiale. Le parent qui aura nié tout lien
biologique avec l’enfant demandeur à l’instance administrera la preuve
contraire en se soumettant à un test ADN que le juge pourra d’office ordonner.
En pareil cas, le juge sera tenu de nommer un ou trois médecins biologistes, qui,
sous serment préalablement prêté, effectueront un ou plusieurs examens capables
de confirmer ou d’infirmer le lien biologique. La décision de nomination des
experts n’est soumise à aucune voie de recours.
S’agissant des membres
relevant du personnel diplomatique, du personnel consulaire et du saint siège
accrédité en Haïti, l’action en recherche de paternité ou de maternité n’est
ouverte contre eux que selon les lois relatives au personnel diplomatique,
consulaire et canonique.
Il sera alloué des
crédits budgétaires annuels destinés à couvrir le coût des tests d’ADN au
profit des petites bourses. Un décret d’application traitera de l’Institution
d’un fonds en pareille matière.
Au cas où le parent
présumé refuserait de se soumettre aux examens médicaux, il y sera contraint
par corps par le Commissaire du Gouvernement sur décision du Juge de l’affaire.
En matière de recherche de paternité ou de maternité, la décision du juge des
référés n’est susceptible que de pourvoi en Cassation.
Le pourvoi sera exercé
dans le délai de huit (8) jours francs à partir de la signification suivant la
procédure tracée par le code de procédure civile pour les affaires urgentes. Si
le pourvoi est régulier en la forme, la Cour statue au fond sans renvoi,
conformément à l’article 426 du Code de Procédure Civile.
Article 8 :
Sont et demeurent
abrogés les articles 302, 303, 304, 306, 308 et 309 du Code Civil.
Article 9 :
L’Article 311 du Code
civil est ainsi modifié :
Article 311.-
La recherche de
paternité ou de maternité est permise tant au parent qu’à son enfant, quel que
soit l’âge de ce dernier. Dans ce cas, elle se fera suivant les procédures
prévues à l’article 7 de la présente loi. Cette disposition est applicable à
tout enfant né sous l’égide de la présente loi.
Article 10 :
Est et demeure abrogé
l’article 313 du Code Civil.
Article 11 :
L’article 606 du Code
Civil est ainsi modifié :
Article 606.
Suivant le principe de
l’égalité des filiations consacré à l’article 1 de la présente loi, tous les
enfants ont les enfants les mêmes droits. Ils jouissent des mêmes prérogatives
en toute matière.
Article 12 :
Est et demeure abrogé
l’article 611 du Code Civil.
Article 13 :
La présente loi abroge
toutes lois ou dispositions de lois, tous décrets-lois ou dispositions de
décrets-lois, tous décrets ou dispositions de décrets qui lui sont contraires
et sera publiée et exécutée à la diligence du Ministère à la Condition Féminine
et aux Droits des Femmes, de la Justice et de la Sécurité Publique, des
Affaires Sociales et du Travail, de l’Education Nationale et de la Formation Professionnelle,
de la Culture et de la Communication, chacun en ce qui le concerne.
Donnée à la Chambre des
Députés, le lundi 10 mai 2010, An 207ème de l’Indépendance.
Levaillant LOUIS-JEUNE
Président de la Chambre des Députés
Jude Charles FAUSTIN Guerda Benjamin ALEXANDRE
Premier Secrétaire Deuxième Secrétaire
Donnée au Sénat de la
République le jeudi 12 avril 2012, An 209ème de l’Indépendance.
Simon Dieuseul DESRAS
Président du Sénat
Steven Irvenson BENOIT Joseph Joël JOHN
Premier
Secrétaire Deuxième Secrétaire
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