Un an après l’annonce du retrait américain de l’accord de Vienne, le président iranien a donné 60 jours aux autres signataires pour mettre en œuvre leurs promesses.
Un an après la
décision de Donald Trump de retirer les Etats-Unis de l’accord signé à Vienne
en 2015 et de rétablir progressivement les
sanctions économiques américaines visant l’Iran, Téhéran a décidé de cesser
d’appliquer « certains » de « ses
engagements » pris dans le cadre de l’accord international sur
son programme nucléaire.
L’Iran arrête de
limiter ses réserves d’eau lourde et d’uranium enrichi comme il s’y était
engagé au titre de l’accord international de 2015, précise le Conseil suprême
de la sécurité nationale iranien. Téhéran donne « soixante
jours » aux pays restant parties à ce pacte (Allemagne, Chine,
France, Grande-Bretagne et Russie) pour « rendre opérationnels
leurs engagements en particulier dans les secteurs pétrolier et bancaire »,
sous peine de voir l’Iran renoncer à appliquer d’autres de ses engagements,
ajoute le conseil. La décision a été notifiée officiellement mercredi
8 mai en début de matinée, à Téhéran, aux ambassadeurs des pays encore
partie à cet accord (Allemagne, Chine, France, Grande-Bretagne et Russie),
écrit le ministère des affaires étrangères iranien dans un communiqué.
Les Etats-Unis ne
seront « jamais otages du chantage nucléaire du régime
iranien », a réagi l’émissaire américain pour l’Iran, Brian
Hook. « Le régime a annoncé aujourd’hui, à l’occasion de
l’anniversaire de notre retrait de l’accord » censé empêcher
Téhéran de fabriquer la bombe atomique, « qu’il entendait étendre
son programme nucléaire », a affirmé le diplomate à des
journalistes. « C’est contraire aux normes internationales et
c’est une autre tentative de chantage nucléaire de la part du régime »,
a-t-il ajouté. Mercredi soir, Donald Trump a publié un décret exécutif
annonçant de nouvelles sanctions visant les secteurs de l’acier, de
l’aluminium, du cuivre et du fer en Iran, qui procurent des devises étrangères
à l’économie iranienne.
Un
an après l’annonce du retrait américain
« Les mesures
prises par les Etats-Unis, en particulier depuis un an mais aussi avant (…) leur retrait [de l’accord], avaient
clairement pour but de causer une interruption de l’application [de
cet accord] », a déclaré, pour sa part, le ministre des affaires
étrangères iranien, Mohammad Javad Zarif, en visite à Moscou. Les sanctions
imposées par Washington ont affecté lourdement l’économie du pays et les
relations commerciales entre l’Iran et les autres pays parties à l’accord.
Les Européens, la
Chine et la Russie ont maintenu leur engagement mais se sont montrés jusque-là
incapables de respecter leur promesse de permettre à l’Iran de bénéficier des
avantages économiques qu’il escomptait de l’accord en contournant les sanctions
américaines.
L’Iran a fait preuve
jusque-là de « patience », mais la République islamique
juge désormais « approprié de cesser d’appliquer certains des
engagements et mesures volontaires » qu’elle a prises dans le
cadre de cet accord, a-t-il ajouté, dans des propos retransmis par la
télévision d’Etat. Néanmoins, insiste M. Zarif, « l’Iran ne se
retirera pas » de cet accord, et les mesures prises par Téhéran,
correspondent à un « droit » laissé aux parties à
l’accord en cas de manquements par une autre partie.
Mise
en garde d’Israël à Téhéran
La France avait mis en
garde Téhéran mardi contre une telle décision, soulignant que des entorses au
compromis de 2015 entraîneraient des sanctions européennes. « Si
ces engagements n’étaient pas respectés, natuellement cette question [des
sanctions]serait posée », a répété mercredi matin la ministre de la
défense, Florence Parly, sur BFM-TV et RMC. « Aujourd’hui rien ne
serait pire que l’Iran, lui-même, quitte cet accord », a-t-elle aussi
déclaré. A la suite de l’annonce américaine de nouvelles sanctions,
le Quai d’Orsay a en outre fait savoir que « la France appelle a
éviter toute action qui alimenterait une escalade ».
« L’annonce du
jour de la part de Téhéran est (…) une
démarche inopportune, a regretté également le secrétaire d’Etat britannique
aux affaires étrangères, Mark Field. Nous incitons l’Iran à ne pas
prendre d’autres décisions menant à l’escalade et de respecter ses
engagements. » Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou,
l’un des plus ardents pourfendeurs de l’accord, a déclaré mercredi que son pays
ne laisserait pas l’Iran se doter de l’arme nucléaire. De son côté, la Chine a
appelé à maintenir l’accord conclu en 2015 qui avait permis à Téhéran
d’obtenir une levée d’une partie des sanctions internationales visant le
pays. « Maintenir et appliquer l’accord est de la responsabilité
de toutes les parties », a déclaré devant la presse le porte-parole de
la diplomatie chinoise, Geng Shuang.
L’annonce iranienne
intervient dans un climat de tension exacerbée avec les Etats-Unis. Le
Pentagone a annoncé dépêcher plusieurs bombardiers B-52 dans la région du
Golfe. Le secrétaire d’Etat
américain, Mike Pompeo, a fait mardi une visite surprise à Bagdad, affirmant disposer d’informations sur « une
escalade des activités de l’Iran » qu’il a accusé de préparer
des « attaques imminentes » contre les forces
américaines dans la région.